Connaissez-vous le théorème du carreleur ?
Si on veut réaliser un pavage en n'utilisant que des carreaux réguliers (c'est-à-dire des polygones réguliers) en respectant deux règles :
   - Chaque coin de carreau ne touche que des coins (condition de non-décalage)
   - On retrouve la même disposition autour de chaque coin (condition des coins identiques)
Alors il n'existe que 11 pavages possibles !
Démontrons ce résultat étonnant :

I) Généralité sur les polygones.
Dans la suite de cette page, nous utiliserons comme unité d'angle le « tour », c'est-à-dire 360°. Ainsi, vous savez certainement que la somme des angles d'un triangle vaut 1/2. Dès lors, si on considère un polygone à n côtés sans sommet caché, c'est-à-dire qu'il y a un point O à l'intérieur de ce polygone et à partir duquel on « voit » tous les sommets, on peut décomposer ce polygone en n triangles ayant tous O comme sommet. La somme des angles de tous ces triangles vaut alors n/2. Donc la somme des angles intérieurs du polygone (on enlève simplement les angles autour de O, soit exactement un tour) vaut n/2 - 1.
Dans le cas d'un polygone régulier, tous les angles sont égaux donc en divisant la somme par n, chaque angle vaut 1/2 - 1/n.
Notez que comme n est supérieur à 3 et comme 1/2 - 1/3 = 1/6, l'angle d'un polygone régulier vaut au moins 1/6.

II) Pavages de Platon
On considère ici les pavages décrits ci-dessus (obéissant au théorème du carreleur), avec la restriction que les polygones utilisés sont tous identiques. On les appelle pavages de Platon. Alors on note n leur nombre de côtés, p le nombre de polygones autour de chaque coin et a l'angle des polygones. Alors pa = 1. Donc, comme a est au moins égal à 1/6, p vaut au plus 1/a soit 6. Donc p vaut 3, 4, 5 ou 6.
De plus, a = 1/2 - 1/n et a = 1/p donc 1/p + 1/n = 1/2.
Si p = 3, on obtient n = 6. Si p = 4, on a n = 4. Si p = 6, on a n = 3. Il est impossible d'avoir p = 5 car alors n = 10/3 n'est pas entier.
Il y a donc exactement trois pavages de Platon : l'un avec des carrés, un avec des triangles équilatéraux et le dernier avec des hexagones réguliers.

III) Le théorème du carreleur
Soient p le nombre de polygone autour de chaque sommet, n1, n2, ..., np le nombre de côtés de ces polygones et a1, a2, ... ap les angles de ces polygones. On a deux conditions :
a1 + a2 + ... + ap = 1
pour chaque i entre 1 et p, ai = 1/2 - 1/ni
On en déduit en sommant tout : p/2 - 1/n1 - 1/n2 - ... - 1/np = 1 d'où 1 + 1/n1 + 1/n2 + ... + 1/np = p/2.
Comme précédemment, on a p = 3, 4, 5 ou 6.
Pour p = 3, on cherche donc trois nombres a, b et c tels que 1/a + 1/b + 1/c = 1/2. On trouve de nombreux triplets solutions, mais seulement 4 permettant de définir un pavage réel : (3, 12, 12), (4, 6, 12), (4, 8, 8) et (6, 6, 6) (le dernier correspond au pavage de Platon à base d'hexagones).
De même, pour p = 4, on trouve (3, 3, 6, 6), (3, 4, 4, 6) et (4, 4, 4, 4) (là encore, un pavage de Platon).
Pour p = 5, (3, 3, 3, 3, 6) et (3, 3, 3, 4, 4).
Et pour p = 6, on trouve seulement le pavage de Platon (3, 3, 3, 3, 3, 3).

Enfin, on remarque que si presque toutes ces solutions donnent un pavage unique, (3, 3, 3, 4, 4) en donne deux selon que l'on ordonne les polygones dans l'ordre (3, 3, 3, 4, 4) ou (3, 3, 4, 3, 4). On a donc bien obtenu 11 pavages, dont 3 de Platon.

Source :
Les malices du kangourou Collèges, ACL-Les éditions du Kangourou, 2002